Coiffeurs du monde

Lors d'un voyage de plusieurs mois comme nous faisons il faut bien de temps en temps (particulièrement pour les hommes) se faire couper les cheveux. On peut toujours faire cela avec les moyens du bord mais c'est une bonne occasion de se mêler à la vie locale et de découvrir une autre facette du pays visité.

La diversité de ces expériences vaut que nous y consacrions un article spécial.


Tarrafal Iles du Cap Vert, Novembre 2018

Dans la petite boutique ils ne sont que deux, le patron et un garçon coiffeur. Le patron annonce un prix imbattable : l'équivalent de 2,50 euros. La vitrine montre pas mal d'exemples de ce qu'ils sont capable de réaliser : beaucoup de têtes de type africain aux cheveux crépus, mais pratiquement pas de cheveux raides. On verra bien, la prise de risques fait partie du voyage.

De suite j'explique ce que je souhaite : pas de dégradé ni de rasage à la tondeuse, pas de coupe « mulet » ni de motifs décoratifs style footballeur vedette. Coupe aux ciseaux toute simple. Après une petite seconde de réflexion et quelques secondes supplémentaires de recherche dans le tiroir de sa desserte, il trouve sa paire de ciseaux. Visiblement il ne doit pas s'en servir tous les jours ! Les premiers coups de ciseaux ne sont pas bien efficaces ni très agréables. En fait ils ne coupent pas bien tout simplement. Il demande alors au patron de lui prêter les siens. Comme son garçon, le patron part fouiller dans son tiroir et en sort une paire qui semble en meilleur état. Mais il apparaît vite qu'après quelques essais elle s'avère aussi nulle que la précédente. D'un ton désolé le garçon m'annonce que vraiment il va devoir faire la coupe avec sa tondeuse mais il a bien compris le style recherché et va faire comme avec des ciseaux. J'ai un petit doute mais j’acquiesce, après tout on verra bien s'il y arrive et au pire, … ça repoussera d'ici qu'on ait traversé l'Atlantique. Le travail fut dès lors vite exécuté, au prix de plusieurs subtils changements de sabots pour faire différentes longueurs et obtenir l'effet désiré. Le résultat était franchement correct surtout par rapport à la crainte qu'avaient générée les cafouillages du début sur la vaine recherche des ciseaux affûtés. Bravo l'artiste,


Bayahibe République Dominicaine, Février 2019

Dans une petite rue de cette ville étrange qui s'anime deux fois par jour au rythme d'embarquement et de débarquement des touristes dans les bateaux de promenade vers les îles et plages alentour, une minuscule boutique qui fait à la fois coiffeur, vente de tissus, et distributeur de cartes de téléphone. Le tout tenu par un garçon plus qu'efféminé moulu dans un tee-shirt rose et portant plus de bijoux et de colifichets qu'un sapin de Noël. Il ne lui manquait plus que la guirlande. Comme chez notre précédent ami du Cap Vert, les murs sont couverts de photos de footballeurs aux crânes ornés des plus extravagants dessins ou de vedettes inconnues aux styles capillaires assez éloignés de ce que je recherche. Mais le coiffeur m'écoute et dans mon espagnol approximatif je lui donne quelques instructions à base de « un poco mas corto » (un peu plus court) ou « no como ello » (pas comme celui-ci sur la photo). N'ayant dans mon pauvre vocabulaire ni les mots pour nuque arrêtée , ni dégradé, ni oreille juste dégagées, les explications furent hélas succincte. Mais en définitive il réalisa une bien belle coupe, peut-être un peu courte et dégradée derrière mais pour les 3 ou 4 euros que ça coûtait que demander de plus.


Antigua Guatemala, Mai 2019

Nous voilà au Guatemala, plus précisément dans la ville d'Antigua. Comme son nom l'indique c'était l'ancienne capitale avant que celle-ci ne soit déplacée quelques 40 kilomètres plus loin pour être plus à l'abri des tremblements de terre fréquents dans cette région. Et ici c'est effectivement antique. La ville et la vie sont telles qu'elles étaient il y a quelques dizaines d'années. Pas étonnant alors que nous ayons trouvé près du centre un coiffeur dont toute la boutique, patron compris, semble tout droit sortie d'un vieux film des années cinquante. On s'attend d'une minute à l'autre à voir s'arrêter devant la boutique le cabriolet Packard 1950 de Humphrey Bogart ou une vieille Ford de la police car le coiffeur dans l'arrière-boutique trafique de l'alcool de contrebande …

Tout est d'époque : le décor, les fauteuils en métal laqué jaune pâle et cuir rouge, les glaces avec entourage art déco , et jusqu'aux instruments de l'homme de l'art. Voilà belle lurette que je n'avais pas vu quelqu'un affiler son rasoir coupe-chou sur une bande de cuir tendue. Le patron lui-même se présente en tenue de figaro et arbore une fine moustache qui est parfaitement raccord avec le reste.

Il doit y être habitué car il accepte volontiers que nous prenions quelques photos souvenir. Puis il a attaqué la coupe et fait un travail de qualité et comme ce que je demandais n'était pas très éloigné de son style standard je fus bien et vite coupé.


Carthagène Colombie Janvier 2020

Un samedi après-midi dans la vieille ville de Carthagène, à l'ombre derrière les magnifiques remparts qui protègent la ville. Il est 14h, peu d’activité encore dans les rues. Et là une belle boutique de coiffure, style bonbonnière avec une dominante de rose. Devant la porte sur le trottoir une des coiffeuses somnole doucement sur sa chaise, elle ne nous voit même pas entrer. A l'intérieur, une autre dort carrément assise sur un des fauteuils, une autre couchée la tête posée sur son coude,une autre dans le fond est concentrée sur son portable et enfin une dernière nous accueille mollement et dit que oui, c'est possible de faire une coupe maintenant. Je m'installe sur le fauteuil, après avoir donné les indication habituelles toujours dans mon espagnol déficient, mais les photos au mur et en vitrines étaient plutôt rassurantes quant aux styles pratiqués dans cette maison. Elle commence la coupe, et à un moment donné il lui a manqué un instrument ou un accessoire je ne sais plus. Elle est alors allée le chercher dans le tiroir d'une de ses collègues et là on l'a vue se déplacer avec une nonchalance telle qu'on aurait cru voir un film au ralenti. C'était à se demander si elle ne souffrait pas d 'un handicap pour marcher aussi lentement. La coupe fut néanmoins exécutée en un quart d'heure et parfaitement bien faite mais nous avons profondément ressenti que nous étions venu déranger à l'heure de la sieste. Alors pourquoi ne ferment-ils pas carrément pour la sieste ? Mystère colombien.


Hiva Hoa Marquises , Mai 2020

C'est dans une maison près du port que Fanette tient boutique. C'est une française qui a suivi son mari militaire et a ouvert sa boutique où dans une pièce unique elle fait coiffure, massages et soins du corps. Comme elle travaille toute seule elle s'organise et ne prend que sur rendez-vous, une personne à la fois vu que lorsqu'elle fait des massages il serait mal venu que d'autres clients soient là et profitent du spectacle. Rien à dire sur la coupe, c'est une vraie professionnelle. L’intérêt était plus dans le contact avec une métropolitaine arrivée récemment dans le pays et qui découvre encore les aspects de son nouvel environnement. Pour tout dire quand elle a su la nouvelle affectation de son mari, « Polynésie Française », des images d'Epinal lui sont passées devant les yeux : plages de sable blanc, cocotiers, lagons bleus, Papeete. Mais Hiva Oa aux Marquises c'est plutôt pas de plage ou alors de sable noir, des eaux profondes rarement bleues, un petit village approvisionné par la bateau une fois par mois. Elle a surmonté le premier choc mais ce fût un peu dur. Avec sa boutique elle a maintenant une position stable et intégrée dans l'île mais de toute évidence elle ne demandera pas à prolonger le séjour.


Raiatea Iles sous le vent Polynésie Française, Août 2020

Je mentionne cette dernière halte capillaire juste pour mémoire car il n'y avait rien de particulier ou de remarquable dans cette boutique-là si ce n'est le fait que c'était la première fois que je me faisais couper les cheveux tout en portant - autant que possible - le masque, Covid oblige. Et ce n'était pas une mince affaire. En effet lorsque la coiffeuse attaqua le tour des oreilles et les tempes l'élastique du masque était sur le chemin. Il a donc fallu retirer temporairement le dit élastique mais tout en conservant le masque plus ou moins tenu avec la main sur le visage. On était plus dans le respect symbolique des consignes que dans l'efficacité scientifique de la protection contre la propagation d'un virus qui à cette date était totalement absent des îles sous le vent. Mais cela rassure les populations locales qui se rappellent que comme au dix-huitième siècle les contaminations viennent des colons étrangers.

Fakarava :

Pour l'instant (Sept 2021), pas de coiffeur sur l'île de Fakarava !

Rangiroa :

Marama coiffure : un salon tenu par une sympathique tahitienne qui a aussi un salon sur Tahiti. Ambiance cool, on est accueilli par deux poussins qu'elle a recueillis !